
Progrès pour les semi-conducteurs : Éliminer la barrière cachée à l’interface métal–oxyde de gallium
L’oxyde de gallium bêta est l'un des matériaux les plus prometteurs pour l’électronique de puissance de nouvelle génération. Grâce à sa bande interdite ultra-large, il pourrait permettre la fabrication de composants capables de supporter des tensions extrêmes, utiles pour les véhicules électriques, les infrastructures de réseau ou encore l’aérospatial. Cependant, les contacts métalliques avec ce semi-conducteur présentaient une résistance électrique imprévisible, parfois si élevée qu’elle rendait les dispositifs inopérants. Selon l’American Institute of Physics (AIP), des chercheurs de l’université Cornell ont identifié la cause majeure de ce problème : une contamination imperceptible à l’œil nu, composée d’une fine couche de carbone, résidu des procédés de fabrication ou de l’exposition à l’air.
Cette couche, nanométrique mais redoutable, s’intercale entre le métal et le semi-conducteur, perturbant l’injection et la collecte des charges électriques. Conséquence directe : des pertes de rendement majeures pour les circuits de puissance. En exploitant la microscopie électronique à transmission à balayage et d’autres techniques de caractérisation avancées, les équipes ont pu observer cette barrière invisible directement à l’échelle atomique. Cette étude, publiée dans Applied Physics Letters, marque l’une des premières visualisations directes d’une telle contamination à l’interface métal-semi-conducteur sur l’oxyde de gallium.
Deux procédés de fabrication, deux stratégies de correction
Les chercheurs ont comparé deux approches industrielles :
- Processus “lift-off” : utilisation de résines photolithographiques pour structurer le métal. Résultat initial : forte contamination par le carbone. Solution : une exposition UV/ozone pendant une heure, ramenant la résistance de contact à seulement 0,05 Ω·mm, un record pour l’oxyde de gallium bêta non allié.
- Processus “metal-first” : dépôt du métal avant structuration du semi-conducteur. Ici, c’est l’exposition à l’air qui génère la couche de carbone. Un traitement à l’oxygène actif pendant cinq minutes suffit à éliminer l’obstacle, avec une nette amélioration du flux de courant.
Un bond vers l’industrialisation des dispositifs à large bande interdite
Cette avancée résout l’un des freins majeurs à la fabrication de contacts ohmiques fiables sur l’oxyde de gallium, ouvrant la voie à des dispositifs de puissance plus performants et reproductibles.
Naomi Pieczulewski, co-autrice principale, déclare :
« Cette recherche ne va pas tout changer d’un coup, mais elle apporte la régularité et la fiabilité indispensables pour une production industrielle. »
Collaboration de haut niveau entre physique, ingénierie et défense
Fruit d’un travail commun au sein du centre AFRL-Cornell ACCESS, cette étude a mobilisé des expertises allant de l’épitaxie des oxydes aux technologies de microscopie les plus pointues.
Une démonstration éclatante que, même face à un problème aussi ténu qu’une couche atomique de contamination, l’alliance entre ingénierie des matériaux et physique appliquée peut débloquer des applications industrielles d’envergure.